Chers lecteurs, chères curieuses, vous allez vous dire, encore un Coup de Gueule, détend toi Sarah… Mais celui là il est spécial. Spécial Psychodon. Et pile à l’heure pour que vous réserviez des places pour l’Olympia, le 13 juin prochain. Ou pas.
- Psycho-quoi?
- Psychodon Léon.
- C’est un dinosaure ?
- Ouais, un putain de pachyderme. Psychodon, c’est le Téléthon, mais pour les fous…
- Donc au lieu de chialer sur des handicapés, on chiale sur des fous ?
- Ouep. 2022. Attrape la bouteille Léon.
Et c’est reparti, dans quelques trois semaines, Bolloré & C+/C8 t’invitent à la grande teuf du santémentalisme.
T’as pas eu l’invit’ ? La voilà :
Rendez vous le lundi 13 juin 2022 à l’Olympia
pour le concert caritatif MOOD OF THE DAY du Psychodon, unis face aux maladies psychiques
Tout au long de notre vie, nous sommes rythmés par nos émotions. La joie, la colère, la peur, le dégoût, la surprise et la tristesse orchestrent notre santé mentale. Le 13 juin 2022, elles donnent le tempo du grand show Mood the Day By Psychodon. Pour la quatrième année consécutive le Psychodon investi la salle mythique de l’Olympia afin de déstigmatiser les maladies psychiques. De nombreux artistes accompagnés de Yannick Noah célèbrent les émotions et chantent pour la santé mentale.
Sur l’affiche, y’a un bonhomme « happy », et un bonhomme « angry ».
LOL.
Si j’avais pas l’habitude, je le prendrais un peu perso, en tant que bipo. Et puis la poésie, l’enrobage… La joie, la colère, la peur, le dégoût, la surprise et la tristesse orchestrent notre santé mentale… La manie? La crise épileptique? Le trauma? Les ralentissements psycho-moteurs? La mélancolie? Les voix? Le suicide? La chimie du cerveau? La prescription du toubib?
- Je crois qu’ils ont essayé de faire un FALC.
- What ?
- Un truc Facile à Lire et à Comprendre, un format plus accessible, c’est plutôt cool. Mais j’déconnais, avec leurs smileys, ils nous prennent vraiment tous pour des cons, Léon.
Par contre j’adore leur anglais à secouer la poire de Shakespear (t’as capté ? Shake – ‘s – pear?)…
C’est la quatrième édition. Les deux premières me sont passées sous le nez, c’est pour dire combien leurs « shows » n’intéressent personne, parce que tout de même, je ratisse les news depuis un moment quand ça cause de nous.
J’ai choppé la troisième au vol. Je dis au vol, mais c’était les enregistrements vidéos de la plateforme Viméo, un soir perdu d’automne 2021. Je dis au vol, mais ça dure quand même plus de 2h, leur bordel.
Je l’ai fait avec amour, pour vous les loulous.
J’avoue, j’ai pas écouté toutes les chansons. Déso. Je me suis fait quand même une idée, c’est pas évident de fouiller une vidéo la première fois, tu tombes forcément sur des trucs que tu veux pas voir ou entendre. Imaginez les Enfoirés, avec le level gênance du Téléthon (donc juste un ou deux crans au dessus), la mise en scène d’une troisième scène d’un festoche dans un bled de la Manche.
Et puis, les loulous, les art-tristes, dites le nous que vous aussi z’êtes des nôtres?
Sauf que le message c’est « à défaut de vivre heureux vivons cachés » (ou alors c’est « si tu veux vivre heureux vis caché gros, ils sont pas prêts »?).
- Bah au moins ils en parlent?
- Ah mon Léon, beh ça suffit pas… Si le projet c’est causer que d’la p’tite pellicule en surface… Ce serait comme gober seulement l’excipient de ton loxapâte quand tu t’envoles, ça va rien changer au délire. T’imagines, depuis le temps qu’on cause de racisme, de violences faites au femmes?
- En fait il faudrait un plan de traitement au long cours?
- T’as tout capté mon Léon, avec exploration des facteurs de vulnérabilités de la normothymie capitalo-persistante, des facteurs déclencheurs de violences institutionnelles, niquer le bouc émissaire avant qu’il ne se reproduise, une anamnèse à géométries variables axée sur la protection des milieux, une analyse socio-historique des comportements hétéro et auto agressifs à l’égard des fous, de leur place dans la constellation familiale intergalactique… Et puis au long cours, j’sais pas… Faudrait un truc explosif…
- Ouais, ah ouais, genre on pourrait aussi utiliser la contrainte?
- Éteins ton téléphone Léon. Tu tiens un truc. Pour niquer le game il faut avoir un plan.
Revenons à nos moutons.
J’ai regardé tous les intermèdes, tous les micro-reportages. 2h de pur régal. De la charité chrétienne dégoulinante. De la condescendance sans masque. De la pitié. Des applaudissements très, très mal placés.
Si vous voulez un condensé (je ne veux pas vous forcer mais si je m’y suis collée 2h vous pouvez bien y consacrer 1min14 : https://vimeo.com/566039250), vous prenez la première partie, vous vous épargniez la musique qui est vraiment à…, vous commencez à 2min44, jusqu’à 3min58, et voilà, vous avez tout regardé, et le ton est donné. Celui qui chope Didier en train de reluquer Caroline dès le premier visionnage est un champion.
- C’est quoi cette poire ?
- Tu vas rire, mon Léon. Cette poire c’est ( » » »musique lyrique » » ») (Didier)« la poire que mon frère a réalisé un jour en atelier bois à l’hôpital ».
- J’vois pas trop la blague ?
- C’est le seul moment où on entend parler du gars. Sa biographie. Le pourquoi du comment du combat de Didier. C’est beau quoi.
Grand air de foire aux monstres, d’expo universelle, de promenade à Bicêtre.
Et surtout, du vide.
La même rhétorique qu’au Téléthon. On change de fou-le et on recommence. Tout pareil. Oui, on sait pas non plus où vont les thunes.
Hé, les amis Handi, si vous me pardonnez d’avoir jusque là globalement fermé ma gueule pour le Téléthon (je veux dire, autrement qu’à l’apéro), j’pense qu’une p’tite alliance est de rigueur ? Rendez-vous le 3 décembre, c’est bien ça?
- Mais ils ont l’air de vouloir déstigmatiser, c’est plutôt bien ?
- Ouaaa. Ok, tu captes rien.
Ah les grands mots, les belles intentions, l’humanisme… Un champ d’épandage comme disait Oury.

Personne ne parle pour sa poire, encore une fois, pour cette quatrième édition, ils vont s’accaparer l’histoire du frangin (Didiche), de la mère (Chimène Badi), encore du frangin (Gringe). Aucun artiste ne parle en son nom.
Stromae, il fait plus de bruit en 4min20 au JT de TF1 qu’eux en trois éditions du Psychodon. Il est pas parfait, y’a pas vraiment de discours politique en back up, et puis la dépression c’est attaquer par le côté le plus smooth – C’est bon Léon, j’sais qu’c’est vénére la dépression – j’corrige, dans l’air du temps. Au moins il écrit bien. Alors que l’hymne du Psychodon… Remarque, ça met une barre, Yannick Noah qui se prend pour Mickaël J. (voir le tube Psychodon en tête des charts interplanétaires – « Une histoire de fou »).
Ça va forcément causer covid c’t’année, parce que c’est pratique, ça cause à tout le monde. Je suis pas sûre qu’on parle de nos aînés enfermés à double tour H24, des confinements massifs dans les pavillons des HP, des soignants qui craquent ou qui sautent. On va plutôt parler des jeunes. Sans mentionner qu’on flingue le système de santé qu’ils méritent.
Les loulous, on va ramer.
Et puis, j’ai compté, en 2021, sur deux heures, il y a trois psychiatrisés qui parlent. Moins de 30 secondes chacun.
Par contre on les applaudis, on nous applaudis, et pas qu’une fois. Yeeeaaah, bravooo d’en chieeer ! Bravooo de nous offrir l’occase de soulager nos consciences bouffies!
Il y a aussi une pépite, un p’tit reportage sympa sur un GEM (Groupe d’Entraide Mutuelle), qui montre bien l’étendue des activités de ces assos.
- Ah, un truc positif alors ?
- S’tu veux mon Léon… Le seul truc qu’on voit c’est des adhérents qui jouent au mémory. Le pire, c’est que tous les coordinateurs de GEM bien pensants vont s’y engouffrer. J’te l’redis Léon, la visibilité c’est souvent à double tranchant…
- Comme le sub.
- Ouep, comme les subventions.
Et puis ils causent jamais vraiment maladie mentale, trouble psy, douleur, isolement, soin en psychiatrie, rétablissement… Encore cette année, je sais qu’ils vont surtout faire chialer avec des chiffres, il y aura p’têt même un « vrai ou faux », de la vulgarisation scientifique de haute voltige. Généralités, lieux communs, amalgames tout est bon pour é-dul-co-rer.
Du pathos accessible pour parler du fossé entre nous. Le creuser. Faire croire au type dans son salon qu’il fait un geste vers nous en regardant l’émission. Conforter, surtout, ceux qui parlent la même novlangue à nos côtés au quotidien, qui eux aussi nous voient comme des gosses à encadrer. De la formule magique, des vocables macronistes, OMSiens, stéréotypés. Creux.
Et aussi dire qu’on est des gens normaux avec des émotions.
Des émotions. Sans blague.
- On a tous une santé mentale. Gnagnagna. Prends la mienne s’tu veux. Back in 2012. Tu vas kiffer. Oublie pas ton magnésium marin, bobolosse.
- Hein ?
- Laisse béton Léon. Et ressers moi un verre. Soyons fous. Et fait péter leur tube.
» » »« Que tout soit normal entre nous. Moi je suis comme vous. Pas très net. » » » »
C’est un vrai problème ça. On n’est pas normaux. On est pas tous pareils. C’est pas « les mauvais en taule » et « les gentils qui souffrent en silence » ou pire « les gentils qui souffrent en se tapant la tête contre les murs à essayer d’être normal ». Les cases elles sont pas faites pour nous. Et toutes les Karen et les Jean-Jacques de France vont encore attendre de nous qu’on soit comme eux, des zombies capitalisés, ou alors, ils nous fuiront comme la peste ou ils appelleront les flics.
Ils vont parler du suicide, sans rien en dire vraiment. Sans dire que ce qui les fait flipper dans nos passages à l’acte c’est le possible d’un des leurs. C’est pratique, ça, de ne pas se poser la question du suicide tous ensemble. De la souffrance au travail, par exemple. Les procès seraient moins faciles à gagner.
Ils vont bien éviter de parler de l’Hôpital qui coule et les soignants avec, ils vont bien laisser de côté les violences institutionnelles de tous bords, le fichage, la réTENTiON dE sûRETé, LeS LobbYs PHArmaCEutIQUES…
- Hé du calme, t’as pas un serestruc à prendre ?
- C’est bon Léon, lâche moi, ça fout la rage aussi…
Les seuls qui auront voix au chapitre sont ceux qui lèchent les bottes FondaSantéMentalistes de Leboyer et Llorca, qui eux-mêmes lèchent les bottes…
- Tu les aimes pas ?
- Les psys de télé ? Les neuroscientistes en carton ? Ceux qui comptent notre douleur toujours d’abord en euros ? Qui cause rétablissement en mode des carrés dans des ronds? Non, mon Léon, je les aime pas.
Et puis un truc que je découvre là, juste ce soir en écrivant, devinez qui est partenaire de la soirée ? Je veux dire, en plus de Vivendi ?
Orpea…
- Orpékoi ?
- Mais siiii, tu saaaiiis, les scandales dans les Ehpads.
- Hein ?
- Vas-y, t’sais quoi, les équipes de Blast font ça mieux que moi: « Business caché des Ehpads privés: le nouveau scandale Orpea » https://www.youtube.com/watch?v=UVprFP0ZTtk
Franchement, j’sais pas vous, j’ai des envies d’enfarinage. De happening. De crazy-riot.
Une foule de pyjamas bleus qui monte sur scène, qui chope Didier et qui le camisol… Ouopopop. C’est pour rire Didiche. Une foule de pyjamas bleus qui chante en chœur la violence psychiatrique. Des boîtes de terchian et de seroplexus qui inondent la scène. Des piquouses gratuites, et un bus à la sortie de l’Olympia pour tester son produit. Ou juste des œufs ou des tomates.
- T’sais quoi Léon ?
- Nan ?
- Il reste des places…
Big bisous les loulous,
À la folie,
Sarah Jolly
PS : Si quelqu’un veut se coltiner la quatrième édition et faire un p’tit résumé pour les archives ? En espérant qu’on pourra dire à nos p’tits enfants « t’as vu, Didier, comment elle était pétée son émission ?». À moins que d’ici là l’humanis-té entière tourne aux benzos.
Je passe mon tour.