La mise en ligne d’USBF en ce moi de juin 2020 ne pouvait pas décemment pas se passer de quelques réflexions sur la crise sanitaire que le monde est en train de vivre.
Je n’ai pas spécialement envie de vous faire un récit détaillé de mon confinement. Il peut être résumé en quelques lignes. Tout d’abord, mes proches ont été épargnés par le virus. J’ai partagé ce quotidien confiné avec mon compagnon, je n’ai souffert ni de la solitude, ni d’une promiscuité malheureuse. Nous avons la chance de vivre dans un appartement que nous aimons, assez spacieux, avec un balcon. Depuis l’année dernière, je suis guide-accompagnatrice pour une société américaine de croisières. J’ai perdu toute ma saison 2020, sans aucune compensation. Je suis certes déçue et écœurée devant cette importante perte de revenus, mais notre situation financière reste confortable, mon compagnon a conservé son salaire à taux 85%, et l’AAH que je perçois me garantit des ressources minimales. L’hiver dernier, je me suis forgée l’habitude d’écrire tous les matins, et je me suis imposée de la poursuivre pendant toute la durée du confinement. Ces temps de travail, principalement dédiés à la rédaction d’articles pour USBF ont été un vrai repère pour moi. Je suis aussi quelqu’un qui lit beaucoup, et j’ai ressorti pelotes de laine et machine à coudre. Enfin, je suis « entrée en confinement » en forme, solide, tant psychiquement que physiquement, et pour veiller à conserver cette stabilité, j’ai continué de déployer toutes les stratégies, d’utiliser tous les outils qui font partie de mon quotidien depuis plusieurs années. J’ai connu dans mon histoire personnelle des « confinements » bien plus durs et bien plus cruels. J’ai éprouvé de la frustration, de la lassitude, de l’énervement, mais je ne suis pas à plaindre. Je suis très consciente de faire, encore une fois, partie des privilégiés.
Privilégiée, mais avec le souvenir encore souvent bien vif des douleurs totales de mon esprit et de ma chair. Il y a eu certaines périodes de ma vie où je n’aurai peut-être pas survécu une telle épreuve.
Mes pensées ont été sans cesse renouvelées pour toutes celles et ceux pour qui cette situation a entraîné, amplifié, décuplé une souffrance psychique insoutenable. J’ai la volonté de ne pas fermer les yeux,d’être lucide, de tenter d’entrevoir les situations de souffrance dans leur individualité et leur multiplicité, dans toutes leurs dimensions. Et une conscience aussi, même diffuse, de celles que je n’entrevois pas.

Tous les jours, mes pensées se sont tournées vers mes pairs et vers les plus fragiles. Psychiatrisés, personnes âgées isolées, personnes handicapées, prostituées, sans domicile fixe, exilés, femmes et enfants victimes de violences domestiques… Vers toutes celles et tous ceux, psychiatrisés ou non, , délaissés dans les murs de leur chambre d’HP, dans les murs de leurs chambre en EPHAD, dans les murs de leur cellule, dans les murs de leur logement, dans les mains de ceux là même qui les oppressent, dans les nouveaux murs imposés à la rue… Toutes et tous, même entourés, livrés à la solitude de leur détresse psychique, souvent dans une grande précarité, encore aggravée par la situation, et privés des seules bouffées d’air encore à leur portée avant le confinement, privés du lien avec les professionnels qui les entourent au quotidien, privés des lieux et des activités familières qui rythment leur vie. Privés aussi souvent de leur lieux d’accueil, de possibilités d’hébergement de nuit, privés des maigre sources de revenus que peut procurer la mendicité, privés de lieux d’aisance, privés de distribution d’aide alimentaire. Privés des soins et bribes de vie et de sociabilité qui leur sont nécessaires pour maintenir la mort à distance.
Mes pensées se sont tournées vers mes pairs, mais aussi vers leurs aidants, privés de relais, privés de leurs propres bouffées d’air, ou privés de tout accès physique à leur proche, vivant la douleur d’assister dans l’impuissance à l’explosion, à la noyade, à l’envie de mourir, ou devant assumer seuls des soins et une attention de chaque instant, au péril de leur propre santé.
Comment survivre dans les murs de l’HP, de l’EPHAD ou de la prison quand on se voit privés de visites, de parloirs, de temps et d’activités collectifs, de sorties et de promenades, de tout ce qui nous apporte du réconfort, de la chaleur ou de l’espoir, quand on vit des situations d’enfermement déjà bien souvent insoutenables ? Que dire de ces « pratiques de confinement » que certains psychiatres ont dénoncés, à l’instar de Mathieu Bellahsen (1) : décisions de fermer à clés toutes les portes de chambres de certains administrateurs, sans (et le plus souvent contre) avis médical, imposant ainsi un isolement forcé à l’ensemble d’un service, ou la mise en quarantaine de chaque nouveau patient, une quarantaine, à l’isolement, à l’écart du groupe, où de ces patients atteint du covid qui ne trouvent de place dans un service de médecine générale que grâce à la solidarité des professionnels d’hôpitaux voisins ?
Chaque semaine passée à l’HP, infantilisées et déchues de leur droits, amenuise la capacité des personnes psychiatrisées à reconstruire leur vie à l’extérieur. La visite d’un proche ou d’un ami, c’est ce qui maintient un filet d’air, c’est un peu de la vie hors les murs qui s’infiltre. C’est aussi ce qui permet de se projeter un tant soi peu dans l’après, or, comment envisager sa sortie d’HP ou de prison dans un monde sous confinement ? Comment envisager trouver un logement adapté, effectuer ses démarches administratives, solliciter un accompagnement pour retrouver un emploi, mener à bien tout ce qui, en temps normal relève déjà des travaux d’Hercule?
Cet accompagnement des personnes les plus fragiles n’a pas été pensé, ou trop peu, trop tard. Les fermetures de certains centres d’hébergement d’urgence, de nombre de points d’hygiène, de centres de distributions d’aide alimentaire ont frappé de plein fouet les plus fragiles, quand les employés et les bénévoles de ces structures auraient pu être accompagnés, et continuer de travailler dans des formes garantissant leur sécurité. Certaines actions auraient permis aussi de soulager un peu la détresse économique des plus fragiles, comme une levée des prélèvements de trop perçus d’aides sociales de la CAF pour ne citer qu’un exemple. Le 2 avril les conditions de confinement des personnes en situations de handicap (2) sont allégées devant la pression de certaines associations, des sorties plus longues, plus loin, mais toujours la solitude, le manque de lien social. Pour tous les autres, les non-encartés, rien ne bouge.
Comme nombre d’entre vous, je n’ai pu qu’imaginer les drames familiaux, plus que jamais réduits au silence du huis clos. Les abus et les violences faites aux enfants et aux femmes, privés de moyens d’appeler à l’aide, de moyens qui, déjà défaillants, insuffisants, peu accessibles avant la crise deviennent purement et simplement hors de portée. D’une manière générale, les « relais » au soins et à l’accompagnement social se sont très largement matérialisés par des plate-formes d’écoute et des rendez vous téléphoniques, qui, si ils ont pu aider certains, ne nous leurrons pas, leur efficacité (forcément relative) n’opère que si un lien pré-existait entre la structure et les bénéficiaires, et ne remplacera jamais la rencontre physique !
Les professionnels, les infirmiers, les aides soignants, les agents de service, les personnels techniques, les personnels médico-sociaux, les médecins, les ambulanciers, les pompiers, les psychologues, les secrétaires médicales, les pharmaciens, les auxiliaires de vie, les assistantes sociales, les éducateurs spécialisés, les animateurs et les bénévoles ont fait du mieux possible, et ont souvent été, la peur au ventre pour eux et leur famille, mais aussi et surtout pour celles et ceux qu’ils accompagnaient, un dernier rempart pour, sinon l’empêcher, circonscrire l’indigne, préserver l’humain. Ils ont supporté des charges de travail supplémentaires considérables, effectués des heures supplémentaires à s’en rendre malade, tout en mobilisant toute leurs créativité et leur ingéniosité pour réinventer leurs métiers à hauteur de l’enjeu !
Quelque chose m’a choqué, dans les débats autour de ces questions, comme si la crise sanitaire révélait ces drames sociaux au grand public. « Redécouvrir » une hiérarchie des valeurs de nos vies n’est pour moi qu’un mécanisme permettant aux plus aisés de s’en laver les mains. On « redécouvre », on se pâme, et on passe à autre chose, quand les écarts ne cessent de ce creuser, et quand l’arsenal politique, administratif, judiciaire harcèle toujours plus les laissés pour compte.
Pendant les premières semaines, la comptabilité morbide des morts a ignoré les personnes âgées, handicapées et psychiatrisés, mais aussi toutes les victimes du covid en outre mer, en même temps que la vie chère, la précarité et le manque de structures de santé et de social… Que dire des « mesures » du gouvernement consistant à doter les établissement d’accueil et de soin de tests et d’équipement seulement après que le virus y ait fait ses premières victimes ? N’oublions pas comment notre champ de vision médiatique s’est réduit pendant la crise, pendant que les réfugiés politiques et climatiques continuent de fuir la mort, pendant que les conflits dévastateurs continuent, en Syrie et ailleurs, pendant que les Ouïghours crèvent.
N’oublions pas ni le harcèlement ni les crimes commis par la police dans les quartiers populaires, du harcèlement aux coups, de l’humiliation à l’assassinat. N’oublions pas qu’en France un flic n’est jamais puni pour ses crimes, et que les familles des victimes, dans leur combat pour la justice, sont sévèrement réprimée. En écho à l’assassinat aux USA de Georges Floyd par la police le 25 mai, mais surtout parce que les assassinats, les violences, le harcèlement et le racisme des forces de l’ordre sont aussi des réalités aussi indignes que dévastatrices en France, l’appel à manifester ce mardi 2 juin des collectifs Justice et Vérité a rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes à Paris et dans d’autre grandes villes. Nous devons nous réjouir de ce soutien massif, même si la lutte menée par les centaines de familles concernées par ces meurtres policiers pour que vérité et justice soit faite, est loin d’être gagnée. À Rennes, ce 6 juin, nous étions plus de deux mille pour soutenir le combat d’Awaa Gueye, pour que justice et vérité soit faite sur le meurtre de son jeune frère Babacar Gueye, assassiné par la police à Maurepas le 3 décembre 2015. N’oublions pas Babacar Gueye, n’oublions pas Gaye Camara, n’oublions pas Adama Traoré, n’oublions pas Allan Lambin… N’oublions jamais. Avant, pendant, et après la crise, ne pas voir et ne pas agir est un choix.
Pour soutenir de collectif Justice et Vérité pour Babacar et vous tenir informés de l’actualité des collectifs Justice et Vérité :
https://www.facebook.com/justiceetveritepourbabacar/
Il est important de comprendre ce qui se joue dans les quartiers populaires, dans les EPHAD, les centres d’accueil thérapeutiques, les HP, les prisons, les centres d’accueil et d’orientation et les centres de rétention administrative, dans la rue… Il ne s’agit pas là de drames individuels, mais bien de drames collectifs dont nous portons tous la responsabilité. Les conditions de vie des personnes les plus fragiles ont été encore violemment dégradées par cette crise, et ainsi peut-être rendue plus visibles. Mais ne nous leurrons pas, le traitement qui est fait aux fous, aux non valides, aux personnes racisées, aux exilés, aux taulardes, aux putes et aux clochards frayait avec l’indigne et l’inhumain bien avant que ce virus ne débarque.
De la même manière, la « redécouverte » des métiers essentiels et la « redécouverte » des rémunérations et des conditions de travail de ces salariés est indigne d’un pays qui ne cesse de se gausser d’être celui des droits de l’homme, de la justice, de la protection sociale. Triste illusion. Je parle bien sûr des employés de la grande distribution (des entrepôts à la caisse), des agriculteurs, des agents de propreté urbains, des agents de traitement des déchets, des agents des services postaux qui ont livrés des colis comme si c’était Noël, des agents de propreté d’entreprises privés, des chauffeurs routiers, des personnels des transports publics, mais aussi tous ceux qui ont dû continuer à travailler dans les usines et les ateliers (dans l’industrie agro-alimentaire pour n’en citer qu’une), les gendarmes et les agents de polices… Tous on travaillé d’arrache-pied, avec eux aussi la peur au ventre pour eux et leurs proches. Toutes et tous, souvent travailleurs à temps partiels, méritent une revalorisation de salaire, par un soutien fort de l’état, et non de primes qui n’ont été enfin de compte que des effets d’annonce, ou pire, se sont matérialisées sous la formes d’insultes et de miettes. J’espère que la « redécouverte » de la valeur et de l’utilité publique de leur travail s’inscrira dans le temps, et que nous saurons nous engager auprès d’eux.
De la même manière, il y a de quoi enrager quand on est freelancer, auto-entrepreneur, ou petit patron. Macron laisse mourir la start-up nation qui l’a élu, le rêve s’évanouit, et le cauchemar est bien réel pour certains, à l’instar des livreurs Deliveroo.
Par bien des aspect, les premières semaines de ce « déconfinement » ont un goût plus acide, plus abject encore. Pas de « révélation » pour nos politique, qui s’entêtent et accélère la marche de leur bulldozer réformiste au non de l’économie et de la loi du marché, nouvelles divinités auxquelles l’humanité tout entière doit se soumettre. Jusqu’à quand peut-on accepter la casse du droit du travail ? De nos acquis sociaux ? Jusqu’à quand va-t-on laisser nos gouvernants s’entêter dans le néo-libéralisme ? Jusqu’à quand pouvons nous continuer de le désastre climatique qui s’annonce ? De quoi avons nous vraiment besoin pour bien vivre, et quelle société désirons nous ?
Maintenant qu’on sait qu’on peut faire pause, et que l’argent magique coule à flots, que faire ? Si les partis politiques de gauche restent dans l’ensemble mutiques, certains chercheurs, notamment en sciences humaines proposes des solutions, élaborent des programmes, et des associations se créent ou se renforcent entre syndicats et associations. La rage est là. Nous devons, nous citoyens, nous l’approprier. Quand la démocratie va si mal, nous ne pouvons plus nous contenter de voter.
N’en déplaise aux chantres du développement personnel et autres instagrameurs, une société plus juste, plus égalitaire, et la reconstruction du lien social ne peut pas passer exclusivement par la prise de conscience béate de quelques bobos à qui la crise a permis de retrouver leur moi profond et le goût de la balade nature. Croire que la transformation sociale passe exclusivement par la transformation individuelle c’est être prisonnier de l’individualisme néo-libéral ce n’est pas lutter. C’est facile, surtout quand on peut remplir son caddy à la biocoop. Je le sais, puisque par bien des aspects je suis moi même une de ces bobos. Le seul moyen qu’une telle « révélation personnelle » ne retombe pas comme un soufflet, c’est l’action, c’est le combat. C’est comprendre que là encore, il s’agit de lutte des classes et que détourner le regard est un luxe. C’est exercer sa responsabilité politique. Le beau, le bon et le juste sentiment ne vont pas faire refleurir le « monde d’après » ex-nihilo. Nous avons la société que l’on mérite, il n’y aura pas de transformation vertueuse sans sueur, nerfs et courage. Gardons tout de même la positive attitude si elle est là, c’est un bon moteur pour viser la lune.
Pour conclure j’aimerai concentrer mon propos sur les enjeux liés à l’hôpital public. Mais d’abord, vous avez peut-être remarqué que je n’ai pas abordé ici les problématiques liées aux effets de la crise sanitaire sur une éducation nationale déjà fragilisée par des années de fermetures de postes, de coupes budgétaires, et de doctrine néo-libérale. Je me sens pourtant aussi très proche du combat mené par les professionnels de l’éducation (enseignants, AESH, animateurs, surveillants, CPE, agents d’accueil, d’entretien et de restauration…) pour tenter de garantir un enseignement de qualité et un accueil et un accompagnement décent des élèves, notamment les plus fragiles. Pendant tout le confinement, les personnels ont assuré l’enseignement à distance et maintenu le lien avec les élèves et les familles, et ont tenté de s’adapter au mieux aux consignes (aux élucubrations?) et à la réalité des structures et des moyens humains en ces premières semaines de déconfinement. Ils ont fait preuve d’une immense créativité, et fournit une somme de travail colossale pour transformer l’ensemble de leurs pratiques au pied levé, dans l’urgence. Par bien des aspects, les problématiques de l’éducation nationale et de l’hôpital public se croisent. L’éducation et la santé sont deux bastions qui résistent encore à la casse des services publics. À nous de faire en sorte qu’ils ne deviennent pas eux aussi des vestiges.
Retournons vers l’hôpital, avec un aveux : Chers soignants, je n’ai pu me résoudre à vous applaudir aux fenêtres à 20h. J’avais l’impression que ces applaudissements, c’était de l’auto-congratulation, ou pire, un rituel robotisé dont l’état pouvait s’attribuer les mérites… J’ai préféré vous écouter, j’ai préféré vous lire, vous voir crier la détresse de l’hôpital public, et toutes les vôtres. J’ai préféré vous écouter, car je vous écoute depuis longtemps, depuis des années, sur les piquets de grève, dans les slogans que vous scandez dans la rue. Chaque fois que vous montrez une détermination sans faille, et que jaillit cette colère légitime, cette colère que nous devons TOUS partager. Car L’HÔPITAL NOUS APPARTIENT À TOUS. Face aux images des soignants réduits à bricoler des surblouses avec des sacs poubelles, pendant que l’état organisait la pénurie de masques, j’ai éprouvé une honte que je ne suis pas prête d’oublier. Face aux soignants et accompagnants contaminés, face aux morts de personnels hospitaliers, j’ai ressenti une colère que je n’oublierai jamais.
Je sais que vous ne voulez pas de médaille, pas de prime lâchée avec dédain, ni que nous nous saignons à vous offrir des congés que vous ne pourrez prendre. Vous voulez de l’argent public, et pas sous forme de chèque vacances. Ce dont vous avez besoin, c’est d’une vraie revalorisation des salaires, ne serait-ce que le dégel de l’indice, de réouverture de lits, de matériel, d’embauches massives, d’un renouvellement des formations (notamment en psychiatrie où la spécialisation des infirmiers a été abolie) Et la fin d’une logique exclusivement gestionnaire, comptable, et d’une emprise grandissante du privé, qui détruisent ce pourquoi vous êtes engagés auprès de nous : le soin.
Le 5 avril Mr Lannelongue, directeur de l’ARS (Agence Régionale de Santé) Grand Est, au plus fort de la tension, qui annonce qu’il n’y a pas de raisons de ne pas poursuivre les réductions de postes et les fermetures de lits au CHRU de Nancy (174 lits et 598 postes sont concernés). Macron qui s’excuse et qui promet, le 15 mai à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, et qui trahit tout de suite. Le gouvernement qui s’entête et remet sur la table la réforme du financement de la psychiatrie… (dilution des financements publics au profit du privé, tarification à l’activité, promotion des files actives qui soumet l’HP à répondre à une logique de rentabilité, incompatible avec le soin en psychiatrie, toute puissance des indicateurs de qualité…)…
Chers soignants en psychiatrie, au fil d’USBF je suis très critique de votre doctrine, de vos paroles et de vos actes. Je milite contre le soin contraint, contre les mesures coercitives, contre la chimie toute puissante et contre les dérives des neurosciences, pour le retour de l’engagement des professionnels, pour le retour de l’affect, pour des propositions de stratégies thérapeutiques plurielles, douces et respectueuses, pour des lieux de soins ouverts sur la ville. Je milite pour qu’un autre soin soit possible, un soin plus humain, humaniste. Je sais que nombre de vos pratiques, nombre de vos gestes brutaux sont en partie dus aux problématiques que j’ai cité ci-dessus. Nous ne serons jamais pleinement des alliés, jusqu’à ce que nous soyons des égaux, puisqu’il nous faudra toujours veiller, militer, lutter. Si j’aborderai ces questions dans un autre article, aujourd’hui, je dis: chers soignants, et je dis: avec vous. Pour faire face à l’urgence. Pour que l’HP respire, ne serait-ce qu’un peu. J’accepte que nous soyons des alliés de circonstance.
Plus que jamais, les soignants ont besoin que nous, les usagers, soyons à leur côté, pour SOIGNER NOTRE HÔPITAL.
Les soignants se défendent et s’organisent, depuis longtemps et plus que jamais. Le Collectif C19, qui rassemble des centaines de médecins a notamment déposé des plaintes en justice à l’encontre d’ Edouard Philippe et Agnès Buzyn. Les mardis de la colères, initiés à Lyon se répandent. Le collectif Inter Urgences, créé au printemps 2019, appelle à une mobilisation massive le 16 juin sur l’ensemble du territoire.
Serez-vous là ?
La page fb du collectif L’Inter-Urgences:
https://www.facebook.com/InterUrg/
À Rennes, l’appel de Sud Santé Sociaux CHGR :
https://www.facebook.com/events/2733456520089885/
À la folie,
Sarah
PS1 : Milles excuses aux grands oubliés de ce texte : à nos libertés individuelles, à notre liberté d’expression, à notre liberté de circulation, à notre droit au respect de notre vie privée, et au secret médical. I WILL BE BACK !
PS2 : À toutes celles et ceux qui profitent de la crise actuelle pour laisser remonter ce qu’ils portent de plus crasseux : la délation, la dénonciation, la culpabilisation, JE VOUS VOIS, NOUS VOUS VOYONS.
- Pour explorer plus loin la psychiatrie confinée, ou plus généralement l’état de la psychiatrie actuelle, je vous conseille de jeter un œil au blog Médiapart du psychiatre Mathieu Bellahsen : https://blogs.mediapart.fr/mathieu-bellahsen
- Les émissions « À l’air libre » proposées par la rédaction de Médiapart, nées pendant le confinement, abordent nombre des problématiques abordées dans cet article, notamment sur l’impact de la crise sanitaire sur la vie des plus vulnérables. Elle sont accessibles sur leur site et via la plate-forme Youtube.