(1ère Partie)
Vous traversez une période difficile, votre vie est sans dessus dessous, prête à exploser ou au point mort…
Vous sortez d’une crise qui s’est terminée derrière les grilles de l’HP, vous êtes étiqueté et affublé d’un traitement à vie, vous aimeriez comprendre…
Vous êtes déjà suivi en psychiatrie, mais vous n’arrivez pas à retrouver une qualité de vie satisfaisante… Vous êtes déjà suivi, mais votre traitement vous noie… Vous êtes suivi, mais les consultations durent cinq minutes, et vous n’avancez pas… Vous ne faite pas confiance à votre psychiatre…
Vous vous sentez différent, vous adapter est de plus en plus difficile…
Vous êtes trimballé de psychiatre en psychiatre, au gré des aléas des services publiques…
Vous avez désespérément besoin d’un bon mécanicien !

Les blouses blanches bénéficient partout, des services d’oncologie au cabinet du gynécologue, d’entre les murs de l’HP au plateaux de télévision, d’une aura savante, d’une sorte d’autorité toute puissante conférée par « la science » et leur position sociale.
Pourquoi ? Parce qu’ils nous inspirent confiance : ils prennent soin de nous, ils représentent un savoir qui nous paraît inaccessible, ils nous proposent une stratégie de soin et l’étayent pour nous convaincre d’y adhérer…
Il est de leur devoir de nous impliquer dans les prises de décisions, de rechercher notre consentement éclairé, et d’explorer avec nous les possibles alternatives. Pour autant, toutes disciplines confondues, la relation du patient à son médecin ressemble parfois plus à celle d’un oisillon à qui on donne la becquée. Nous sommes dépendants d’eux, certains en profitent, et demander une seconde opinion n’est ni un réflexe, ni un chemin facile.
Je ne veux pas, loin de là, fustiger l’ensemble des médecins, la plupart font un travail exemplaire. Ce que je questionne ce n’est pas tant l’intégrité des médecins, que les conséquences de notre manque d’habitude à interroger leurs décisions, et à participer activement aux processus de soin. Pour moi, une relation de soin doit être basée sur une participation active et éclairée des deux parties. Elle doit être co-construite. Ainsi, ce défaut social et culturel ne repose pas seulement sur le corps médical mais sur chacun d’entre nous.
Ce que je questionne ici, donc c’est la relation entre patients et soignants, et plus particulièrement celle des psychiatrisés et des psychiatres. Et ce, justement parce que, là, plus que partout ailleurs, le déséquilibre est mortifère.
Quand nous consultons pour un os cassé, une grippe ou un souffle au cœur, nous nous présentons au praticien physiquement diminué, mais notre intégrité psychologique n’est pas questionnée. En psychiatrie, c’est tout l’inverse, la consultation repose sur le fait que notre santé mentale est fragile. Des pans entiers de nos mondes psychiques sont invalidés, nos esprits et nos chairs marquée par des traitements inadaptée, en même temps que nous sommes souvent considérés, au mieux, comme des enfants à redresser, au pire, comme des causes perdues. La parole et la main du médecin est partout, et infiltre tous les pans de nos vie, tous les jours.
Je ne dis pas qu’il n’y a jamais de violence en médecine somatique, mais pas une violence aussi systématique et totale.
Je ne dis pas qu’il n’y a que des ordures dans les services de psychiatrie, mais force est de constater que sur la trentaine de psychiatre auquel j’ai été confrontée, seuls cinq ou six m’ont traitée de manière sensible et humaine. L’idéologie qui sous tend cette « science » est moribonde, depuis maintenant plus de trente ans, et les derniers psychiatres formés à être avant tout des humanistes sont en train de partir à la retraite. La psychiatrie est le parent pauvre de la médecine, je ne vous apprends rien, et elle carbure à la chimiâtrerie et aux statistiques.
Je m’en rends compte, ce que j’écris est loin d’apporter de l’espoir. La triste réalité est qu’il est très compliqué de s’entourer de praticiens de confiance. Si c’est si difficile, c’est aussi je crois parce que la folie, et avec la discipline psychiatrique, appartiennent encore au domaine du tabou. Beaucoup feraient tout pour ne pas se retrouver en face d’un psychiatre, quand bien même l’accompagnement d’un thérapeute de qualité leur serait d’une grande aide, ou en tout cas une meilleur aide que celle dispensée par les généralistes qui prennent le relais, notamment dans des cas d’états dépressifs.
Mr et Mme tout le monde ne se rendent pas chez le psychiatre, et la parole des fous et des folles est invalidée. La discipline manque cruellement de d’âmes « valides » pour la confronter, la questionner, la faire vivre.
Trouver le bon accompagnement est difficile, mais pas impossible. J’aimerai que chaque psychiatrisé qui me lise soit sûr qu’il existe toujours la possibilité d’améliorer sa qualité de vie, de s’émanciper, d’aller vers une vie qu’on a vraiment envie de vivre !
Quand la vie est devenue insipide et dangereuse, quand on vit dans l’inconfort le plus total, et qu’il grignote nos vies par tous les bouts, je crois sincèrement que le soutien d’un psychiatre choisi peut être salutaire.
Quand on a été étiqueté, quand on est entré dans la spirale sans fin des neuroleptiques, des régulateurs de l’humeur et autres électrochocs, et que l’arrêt des médicaments n’est pas envisageable sans créer d’autres dommages, alors, nous n’avons pas d’autre choix que de composer avec la psychiatrie.
Honnêtement, je suis écœurée par la valse des psychiatres qui a ponctué mes hospitalisations, mais si je juge dangereux certains praticiens en particulier, et l’ensemble de la machine, et que je juge assez sévèrement les suivis proposés par des CMP débordés, j’ai un autre regard sur la psychiatrie libérale.
L’hôpital est odieux pour un milliard de raisons, je n’en ferais pas le tour ici, juste assez pour vous convaincre de son inadéquation complète avec un processus de soin vertueux. Outre des mesures coercitives abusives, les hospitaliers ne lésinent pas sur la chimie. Les informations ne sont pas transmises d’une hospitalisation à l’autre, et ce même au sein du même établissement. Lors d’une hospitalisation contrainte, le traitement médicamenteux est imposé, par la force si besoin, et même en hospitalisation libre il est très difficile d’avoir son mot à dire. D’une hospitalisation à l’autre, à chaque fois un nouveau psychiatre, et parfois deux ou trois pendant la même hospitalisation…
Dans les CMP, les délais sont très longs, parfois jusqu’à un an avant d’obtenir une nouvelle consultation. Les CMP sont engorgés, et les psychiatres sont en grande partie des psychiatres hospitaliers. On vous y attribue un médecin, et comme ces derniers sont amenés à traiter tous les patients, ils sont interchangeables et « généralistes » (ils n’ont pas développé de spécialité psychiatrique).
Mon premier conseil est donc, si vous souhaitez entamer ou poursuivre un suivi psychiatrique, si possible et dès que possible, de sortir du service publique et de se mettre un quête d’un psychiatre libéral.
S’il elle est prescrite par le médecin traitant, la consultation est remboursée à hauteur de 70% du tarif conventionné (la consultation psychiatrique secteur 1 est de 46,70 euros (1), remboursée à 70% de 31,69 euros). Si vous avez entre 16 et 25 ans, vous êtes remboursés au même taux sans avoir besoin de prescription de votre généraliste. Un complément de prise en charge peut être proposé par
Si vous avez été « étiqueté » (bipolarité, schizophrénie, dépression chronique, autisme, Alzheimer…), vous pouvez bénéficier d’une ALD (Affection Longue Durée) exonérante (2). Vos soins sont pris en charge à 100%, et vous n’avez pas à avancer d’argent ni chez le psychiatre, ni à la pharmacie, ni pour des frais d’hopitalisation.
Je comprends tout à fait qu’« administrer » sa différence puisse être pénible, mais, lorsque, comme moi, on a besoin d’un suivi régulier et on a un budget tout sauf illimité, c’est un vrai soulagement de bénéficier de l’ALD. Elle est soumise au secret médical et vous n’êtes tenu, à aucun moment, de l’annoncer à quiconque (employeur, logeur, banque…).
Il est vrai que les dérives sécuritaires de nos gouvernements et la crispation sociale autour des psychiatrisés ne semblent pas assurer que ce secret médical soit garanti à tout jamais. Pour ma part, je nourris l’espoir merveilleusement fou que nous connaîtrons des jours meilleurs, même si la lutte s’annonce longue et rude…
Vous rencontrerez peut être un, deux, ou trois psychiatres avant de trouver quelqu’un qui vous convienne, ce qui peut être laborieux quand la vie toute entière est difficile, mais vos efforts seront récompensés. Nous ne devrions pas faire de compromis quand il s’agit de nous reconstruire.
Certains psychiatre choisissent de se spécialiser dans l’accompagnement d’une pathologie, ou d’un même ensemble de trouble. Ce peut être une bonne piste pour commencer ses recherches, lorsque l’offre médicale le permet. Ces spécialistes sont souvent passionnés, et ont dévoué leur vie à chercher les meilleurs stratégies possibles pour un trouble donné.
Un bon psychiatre, est un médecin en qui on a confiance, avec qui le contrat repose sur la visée de notre autonomie la plus complète, et d’une qualité de vie qui ne se contente pas d’être indolore. Un bon psychiatre s’appuie sur votre histoire, sur vos propres forces.
Un bon médecin ne se contente jamais de renouveler l’ordonnance, même si tout va bien, il vous invite à avancer dans votre connaissance du trouble et à construire et consolider des outils de prévention et de gestion !
Dans la seconde partie d’ « Un bon mécano… », nous explorerons la notion d’« alliance thérapeutique », illustrée par mes relations avec des thérapeutes choisis, et comment des stratégies de soin saines s’appuient toujours avant tout sur nos propres ressources et notre capacité à (ré)apprendre à maîtriser notre récit.
À la folie !
Sarah
- Tarif de consultation applicable au 15 septembre 2018, pour de plus amples détails, visitez le site de l’Assurance Maladie.
- Je vous invite, là encore, à visiter le site de l’Assurance Maladie.