Je ne parle pas des jours où tenir son programme est dur.
Des jours où l’envie de ne rien faire, d’attraper son crochet ou de brancher son cerveau sur une plate-forme de streaming traîne en arrière fond.
Pas plus d’un coup de sang, ni d’une déception.
Pas plus d’un acte manqué, d’une séance de sport annulée, d’un retard au travail.
Les jours dont je parle sont plus amers, plus épais d’un orage qui réduit le temps et l’espace.

Les jours où le glissement est déjà à l’œuvre, et bientôt la tétanie.
La déprime est là, le rythme a perdu toutes ses coutures.
Les jours où chaque effort compte, c’est la suite logique de Ces jours où le ciel qui tombe sur la tête n’est pas loin.
Une mauvaise estimation du terrain et de sa porosité.
Les jours où chaque effort compte, c’est savoir que l’espoir et toutes les victoires passées ne suffiront pas.
La boîte a outil s’est réduite, amputée de ce que vous appelez « la volonté ». Il n’est plus question de bricoler, de faire des réglages. Il faut élaborer une stratégie.
C’est le manque de douceur qui m’a emmené là, et en fait très peu de choses qui sortaient de ma maîtrise.
L’horrible constat. Je savais, je l’ai vu venir.
Je ne peux plus invoquer la malchance du débutant, peut-être que c’est surtout ça qui me ronge.
Si c’est mon manque de douceur, si je ne me suis pas écoutée, pourquoi rester aussi dure à mesure que je m’enfonce ?
Je crains le point de non retour.
Muette, pieds et poings liés, et le cœur cryogénisé.
Déjà ma vie sociale se réduit, bientôt il sera dur de commander un café et d’aller chercher du pain.
Je fuis certains rendez-vous, certaines personnes. Je n’ai pas envie de jouer la comédie ou de m’avouer à terre.
J’ai de nouveau peur.
Je ne me lève plus, je fusionne avec mon matelas, d’un sommeil qui produit une gueule de bois. Je vis des demie-journées, et le soir je n’ai pas sommeil.
Chacune de ces nouvelles chutes se joue comme une tragédie, même si j’apprends et je m’oblige à une approche moins dramatique.
La comédie musicale a perdu sa superbe, les comédiens attendent la reprise sans trop y croire.
Je noircis un peu plus la situation. Je prophétise la chute et bientôt la vie me l’amène sur un plateau.

Je n’offre plus mes semaines et mes mois, je n’offre plus mon cœur et mes rêves à la bête, hors de question.
D’abord le corps. Je sais que c’est d’abord de sentir la vie dans mes muscles et sur ma peau qui me rendra mes couleurs.
Chaque heure de soleil attrapée est une victoire, chaque demie heure de sport une médaille d’or.
Chaque repas sain, pris à une heure décente est un miracle, chaque tablette de chocolat écartée est un bras de fer gagné.
Je m’interdis les verres et les fumées, ils sont réservés à la fête, pas à la fuite.
Ensuite les rythmes.
Un somnifère à 21h pour casser le nouveau cycle qui s’est installé.
Le premier réveil à 8h sera mon premier vrai succès.
Puis les activités, le déroulé de mes journées.
Le travail, des tâches d’abord simples. Une heure et demie, puis deux, puis trois.
Le tas de papiers qui s’est accumulé. Tenir une visée raisonnable mais ferme.
Le programme noir sur blanc.
A chaque fois une poussée, un décollage, 5, 4, 3, 2, 1. (1)
Aussi, le plaisir.
Les amis.
Une balade dans la nature.
Une session couture.
Un stop au magasin de laine.
Un gâteau à la carotte.
Enfin, des balises.
Si ça ne va pas mieux dans quatre jours, je prends rendez-vous avec ma mécanicienne.
Si ça ne va pas mieux dans quatre jours, je prends rendez-vous avec ma psychothérapeute.
Les quatre jours qui viennent, les quinze jours qui viennent, chaque effort compte.
Je me retape. Je construis une nouvelle prophétie.
Ne me souhaitez pas bonne chance, souhaitez moi du courage.
À la folie,
Sarah
- 5, 4, 3, 2, 1 : Une auteure américaine de développement personnel, Mel Robbins a écrit La règle des cinq secondes, ou elle détaille un outil pour prendre des décisions, écarter les doutes et passer à l’action. Elle n’a pas son pareil pour me mettre un coup de pied au ***. Je vous promets un prochain billet sur le développement personnel et la psychologie positive, vastes sujets qui provoquent en moi autant d’amour que de dégoût.