Aujourd’hui je partage avec vous une nouvelle histoire d’hôpital, un nouveau bras de fer avec un médecin. Un bras de fer dont j’espère que nous sommes tous deux sortis grandis. En fait, c’est plutôt une partie de Risk qui se joue à mes dépends, avant qu’enfin j’aie la force d’envoyer valser le plateau. Un tournois à moult rebondissements et à trois voix, celles du trio consacré : psychiatre-infirmière référente-psychiatrisé.
Cette « partie serrée » se joue il y a un peu plus de deux ans, au début du mois d’août (du 1er au 17), en 2018. Elle s’étale sur quinze jours. Je suis en hospitalisation libre pour traiter un nouvel emballement : un état maniaque, une décompensation, la manifestation de mes états extraordinaires, peu importe le vocable.
Je n’ai connu ni emballement ni hospitalisation depuis plus de trois ans. C’est la première fois que je parviens à ce qu’emballement ne soit pas synonyme de soin contraint. Je ne suis pas en service fermé, mais dans une unité « semi-ouverte », où les portes s’ouvrent à la demande, grâce au clés bien gardées par les soignants, et selon les recommandations du médecin. Je suis en hospitalisation libre. Je peux théoriquement quitter l’hôpital quand je le souhaite, et j’ai théoriquement mon mot à dire sur les traitements qui me sont proposés. Un pas de géant. Pourtant, cette hospitalisation a été traumatisante par bien des aspects.

Pour raconter cette quinzaine douloureuse, je dois remonter un peu le fil du temps.
Une semaine plus tôt, je me présente au service d’accueil et d’orientation de l’hôpital (SPAO). Je me sens partir, j’ai essayé de me concocter un plan d’attaque thérapeutique pour enrayer la montée mais la situation m’échappe. Je n’ai pas confiance en mon psychiatre référent du moment. Il fait partie de ces spécimens dangereux qui se contentent de renouveler l’ordonnance en cinq minutes. Il se souvient de mon nom quand je lui tends ma carte vitale. Je suis prise au piège, cet ersatz de suivi ne me sera d’aucune utilité en ces temps de crise. Je ne prends même pas la peine de l’appeler.
Devant la psychiatre qui « accueille et oriente » au SPAO, je suis agitée, mais surtout extrêmement concentrée. Je lui dresse l’historique de l’apparition et du développement du trouble, et lui explique dans le détail les molécules et les posologies qui m’accompagnent, ainsi que celles utilisées par le passé en temps de crise et qui ont fait leurs preuves.
Pour cela, je dois remonter le temps encore un peu plus.
Arrêter les régulateurs de l’humeur et les antipsychotiques ou, à minima, alléger le traitement le plus possible a toujours été une de mes priorités. Avec le Dr D. qui m’a suivi de 2013 à 2017, cette conversation était ouverte et régulière. La relation thérapeutique nouée avec ce psychiatre qui avait consacré sa carrière à l’étude clinique et à l’accompagnement des troubles de l’humeur était exceptionnelle. Je lui dois une part importante de ma stabilité et de mon autonomie actuelle. Le Dr D. n’étais pas particulièrement favorable à un arrêt total des médicaments, position qu’il défendait en expliquant que celles et ceux qui avaient sauté le pas parmi sa patientèle rencontraient de nombreuses difficultés. Malgré cela, à aucun moment il n’a dit qu’il n’assurerait plus mon suivi si telle était ma décision. Il était par contre partisan des petits pas et m’avait convaincu sur ce point. Au moment de son départ en retraite, à l’automne 2017, nous discutions depuis plus d’un an d’une éventuelle bascule de la bithérapie régulateur de l’humeur + antipsychotique à une monothérapie régulateur de l’humeur. Il était convenu que je tenterais l’expérience quand une période de calme propice à son succès se profilerait.
Au printemps 2018, je retrouve mon compagnon en Turquie pour 2 mois. J’y ai une vie solitaire, il travaille beaucoup, et mes maigres connaissances du turc ne me permettent pas une vie sociale digne de ce nom. J’ai une vie réglée, j’écris et je me balade. J’entraperçois cette période de calme qui va me permettre d’effectuer le sevrage des antipsychotiques dans de bonnes conditions. Pour cela, je m’aide de l’excellent Guide pour décrocher des médicaments psychotropes du Projet Icare (1), je le lis et relis scrupuleusement, et je planifie une réduction progressive de la posologie sur trois semaines. J’ai parfois quelques difficultés à dormir, une sensation de nausée apparaît ici et là, mais la transition se fait sans encombres majeures. Je suis sevrée. Je me suis libérée d’une partie de mon traitement.
Au cours de l’été, de retour à Rennes, un emballement se profile, en réaction à un niveau de stress élevé dû en partie à mes conditions et mon cadre de vie, et le changement brutal d’une vie très calme en Turquie au tourbillon rennais. Je pense que j’aurai absorbé le choc si mon traitement n’avait pas été allégé. Dans l’après coup, je réalise que j’ai commis une erreur importante lors de cet essai pour réduire le traitement médicamenteux. Je n’ai pas vérifié si le régulateur de l’humeur que je souhaitais garder était dosé de manière optimale. Les dernières analyses indiquent que la concentration du médicament se situe juste en dessous de la fourchette thérapeutique, c’est-à-dire du dosage qui garanti sont efficacité. Je pense que j’aurai absorbé le choc si le régulateur de l’humeur avait été correctement dosé. Mais rien ne sers de tenter de mettre Rennes en bouteille.
J’espère que je ne vous ai pas encore perdus, les détails de toute cette sombre affaire sont importants.
Lorsque je décris ma situation, lors de cette première prise de contact au SPAO, je n’omets pas de parler de cet essai pour réduire le traitement. J’explique ma démarche. Bien que déjà un peu haute, je suis très concentrée et je dispense ici toutes les informations nécessaires à la bonne compréhension de mes interlocutrices. J’annonce aussi mon souhait de revenir à la bithérapie initiale et à sa posologie, celle du régulateur de l’humeur combiné à l’antipsychotique, puisqu’elle s’est révélée très efficace et a garanti la belle stabilité que je connais depuis trois ans.
Suite à ce rendez vous, je suis orientée vers une unité de soin psychiatrique de courte durée qui se situe au sein du CHU. C’est une unité ouverte, je suis en hospitalisation libre. Théoriquement, j’ai besoin de quelques jours pour me recadrer/recentrer/redescendre, mais un événement va continuer de m’emmener vers les cimes les plus hautes. La vie parfois vous offre de jolis ascenseurs émotionnels, cette fois pour moi il prend la forme d’un faux positif au VIH. Je passe 24h dans l’attente d’un second résultat sans que l’équipe médicale ne me laisse aucun doute sur le fait qu’il s’agira d’une confirmation du premier test positif. L’inquiétude, le stress, la culpabilité sont d’une intensité dévorante. Cet épisode de stress se meut sur un terrain déjà fragilisé, et amplifie les symptômes de la crise naissante. Rassurée par le second test VIH qui est négatif, je fais part de mes craintes quand à mon état d’agitation à l’équipe qui m’accompagne, et je les interroge sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation. La psychiatre balaye mes craintes : c’est normal que je me sente euphorique, c’est parce que je suis soulagée.
Cette psychiatre que j’ai rencontré plusieurs fois fait partie des rares psychiatres hospitaliers avec lesquels les termes de l’échange me conviennent. Dans ce cas précis, elle manque pourtant clairement de discernement, et aurait dû me convaincre de poursuivre l’hospitalisation quelques jours de plus, et même si cela impliquait mon transfert vers une autre unité de soin.
Je sors de ce séjour de quatre jours dans un état d’excitation nerveuse bien supérieur à celui qui a justifié mon admission. Je continue de grimper. Quatre jours plus tard, aux urgences du CHU où je me rends consentante sous la supervision de deux amies, c’est la même psychiatre qui préconise que je sois hospitalisée, cette fois dans les murs de l’hôpital psychiatrique. J’arrive à l’hôpital de mon plein gré et sur mes deux pieds malgré le délire qui s’est installé.
Je suis en hospitalisation libre, mais ma capacité à communiquer et à défendre mes intérêts est émoussée par l’agitation qui se manifeste.
Dans un premier temps, et donc d’abord dans le respect de mes indications, le traitement initial (celui antérieur à ma tentative d’arrêt d’une des molécules) est rétabli, selon la même posologie. Mais lorsque la manie commence à s’installer, ce traitement ne suffit plus. Mes prises ont été erratiques entre les deux hospitalisation, et la molécule réintroduite n’agira pleinement qu’après quelques semaines.
J’ai évoqué la possibilité d’utiliser un autre antipsychotique pour enrayer la crise. L’interne en psychiatrie qui me suit l’a enregistré comme traitement « si besoin ». Lors du passage à l’infirmerie, il ne m’est donné que si j’en fait la demande, demande dont je suis désormais incapable.
Je continue donc mon ascension vers les sommets.
L’interne prends alors la décision d’introduire une nouvelle molécule bien que je lui signale un passif douloureux relatif à la prise de cet antipsychotique précis. Sa prescription prévoit aussi l’arrêt du médicament que nous essayions depuis huit jours de réintroduire. Sa décision va à l’encontre de mes souhaits et du savoir expérientiel que j’ai construit.
Je suis prise au piège. Mon état d’agitation s’aggrave et met en péril mes conditions d’hospitalisation. Je risque à tout moment de basculer en hospitalisation contrainte, et la menace d’un nouveau séjour à l’isolement plane dangereusement. Je suis aussi totalement tributaire du rythme des entretiens médicaux qui m’est imposé, je ne nourris aucun espoir d’être de nouveau reçue par l’interne avant plusieurs jours. Pour les néophytes, je précise qu’à l’hôpital, nous n’avons pas accès au médecin, nous sommes convoqués selon un agenda qui ne nous est jamais dévoilé, ce qui est très différent, et alimente ce jeux malsain autour de l’idée de frustration.
Je n’entrevois aucune autre solution que de me plier à cette nouvelle ordonnance.
Les effets secondaires sont terribles. Je vis des journées interminables de douleurs physiques et psychologiques. Ce médicament m’a déjà été prescrit, lors de ma première hospitalisation en 2012. Je l’associe à l’ultra-violence de mon entrée en psychiatrie, et à ces premiers mois où presque tout en moi avait quitté la vie.
Mon esprit le rejette, le plus fort qu’il peut. Et mon corps. Je suis traversée d’intenses douleurs musculaires, jusqu’à en trembler, de mouvements incontrôlés, d’une sensation d’étouffement. Ma poitrine est constamment oppressée, j’enchaîne les bouffées d’angoisse qui m’obligent à m’allonger. Je suis nauséeuse, mon estomac est une pierre.
J’obtiens un week-end de permission où je traîne ces pénibles douleurs jusqu’à mon domicile. Je suis incapable de sortir avec ce corps et cette tête douloureux. Je vais pourtant chercher mon compagnon à la gare, où je subis un des plus violents accès d’angoisse de ma vie, j’étouffe et je reste accablée sur le siège de la voiture, la portière ouverte. Je ne sais pas si la voiture est moins oppressante que le parking souterrain. Des secondes qui durent des heures.
Si les effets secondaires sont violents, la prise de cet antipsychotique a au moins le mérite de contenir un peu la manie. De retour à l’hôpital, je suis de nouveau prête à reprendre ce qui ressemble de plus en plus à un combat.
Dès l’entretien suivant avec l’interne, je lui fais part des effets violents que je subis, et de ma volonté de revenir au traitement initial. Il accepte d’accéder à ma demande, et je sors de son bureau soulagée.
Quelle n’est pas ma déconvenue quand je m’aperçois lors du rituel pharmaceutique suivant que, si la molécule que je souhaite réintroduire apparaît sur l’ordonnance à une toute petite posologie, celle qui m’assène tant de douleurs est toujours présente ! L’infirmier qui distribue les pilules se soir là ne m’enfonce pas le cachet dans la gorge. Pour autant, il décourage toutes mes tentatives de refus, allant jusqu’à la menace: il serait dommage de mettre en péril mes conditions d’hospitalisation. Je gobe donc la maudite pilule. Je me sens à nouveau prise au piège. Trahie.
Devant ma réaction de colère et de dégoût une des infirmières prend la peine de m’écouter. Elizabeth (2) sera d’un grand soutien pour les rounds suivants.
Comme je l’ai expliqué plus haut, je viens de voir l’interne, je n’ai aucun espoir de le revoir avant plusieurs jours.
Il est hors de question que je prenne cette saloperie un jour de plus.
J’ai la tête un peu plus froide, je suis donc en mesure de mieux comprendre ma situation. J’identifie deux enjeux principaux. Le premier, c’est de continuer ma descente vers l’humeur normale, et de la consolider assez pour pouvoir sortir. Le second, c’est d’éviter à tout prix une nouvelle prise de ce médoc qui me fait mal.
Je n’ai pas d’autre choix que de refuser une partie de la prescription, et je n’ai aucun pouvoir pour augmenter la posologie du médicament que je souhaite réintroduire. En refusant une partie du traitement, j’en perds les effets stabilisateurs alors que l’autre médicaments n’agit pas encore.
J’ai pourtant une porte de sortie : la première prescription émise par l’interne comprends une molécule que j’ai l’habitude de prendre pour contenir les états maniaques. Je l’ai citée plus haut, il est prescrit comme « si besoin ». Elle ne m’est pas proposée systématiquement, mais je peux la demander.
Le soir suivant, je refuse de prendre le médicament qui ne me convient pas, malgré l’insistance de l’infirmier, et je complète la prise de mon régulateur de l’humeur habituel par cet antipsychotique « si besoin ».
Les jours suivants, jusqu’au prochain rendez-vous avec l’interne, je renouvelle l’opération. Chaque soir, lors du rituel de pharmacie, je dois convaincre l’infirmier ou l’infirmière en face de moi que je sais ce que je fais, et balayer leurs arguments. « Si le médecin l’a prescrit c’est que ce médicament est nécessaire. ». « Votre refus risque de compromettre votre rétablissement. ».
Chères lectrices, chers curieux, vous voudrez bien noter ici que ma liberté d’action à l’heure de l’ouverture de l’armoire à pharmacie, toute relative qu’elle soit, ne m’est permise que parce que je suis en hospitalisation libre.
Ma stratégie porte ses fruits, puisque mon humeur s’éloigne un peu plus chaque jour de ce que la psychiatrie décrit comme un état pathologique. Pour autant, la bataille est loin d’être gagnée, la posologie du médicament que je souhaite réintroduire n’est toujours pas suffisante pour me garantir une stabilité optimale, ou dit autrement, me garantir de sortir de l’hôpital rapidement. De plus, je ne peux pas prendre le médicament « si besoin » indéfiniment : s’il a vocation de m’assommer quand je suis haute, il risque fort de m’emporter avec lui dans les abîmes de l’état dépressif, aggravant encore le ralentissement qui, chez moi, suit malheureusement encore l’emballement.
Je bouillonne, j’essaie par tous les moyens d’obtenir que mon rendez-vous soit avancé, sans effet.
Le temps continuant de passer même lorsqu’il le fait péniblement, je suis reçue de nouveau par l’interne du service, le bien nommé Dr Né de la Dernière Pluie. Une semaine a passé depuis le dernier rendez-vous. Je suis accompagnée par l’infirmière Elizabeth, comme à chaque fois depuis le début de mon hospitalisation.
Il fait rapidement chaud dans le bureau. Ce sont les esprits qui s’échauffent. L’interne défend sa position et la prescription qu’il avait faite qui incluait encore le médicament qui m’est insupportable. Il continue de lui attribuer le mérite de l’amélioration de mon état, quand je l’attribue à la prise de mon médicament « si besoin ». Les faits, l’observable, plaident en ma faveur, puisque cela fait plus de cinq jours que j’ai opéré la bascule. Elizabeth tente de jouer la modération, sans apaiser la tension palpable.
Il se renferme dans une posture qui veut dire « Je suis le médecin, je sais. ». Il est peut-être aussi surpris de se retrouver en face d’un tel spécimen : je jargonne aussi bien que lui, je sais ce que je veux, ce qui me va. En fin de compte, entre l’interne en psychiatrie générale et la patiente spécialiste de sa pathologie, l’argument qui accrédite l’aval de la parole du psychiatre, cet argument du savoir qui justifie la position d’où s’exerce le pouvoir, s’efface. Sur le terrain de la bipolarité, de ma bipolarité, face à ce médecin qui ne me connaît pas, face à tous les médecins qui ne me connaissent pas, j’ai une longueur d’avance.
Les échanges houleux ont le mérite de mettre au jour le présupposé sur lequel est bâti l’argumentation du médecin. Au milieu de la conversation fuse un « Si je juge que cette molécule ne vous convient plus c’est parce que vous l’avez arrêtée brutalement et sans accompagnement ».
Face à cette assertion, toute forme de patience ou même de volonté de maintenir un semblant d’alliance thérapeutique me quitte. Je refais devant lui l’historique de l’arrêt de cette molécule. Je m’assure que ce soit clair. Cet arrêt n’a rien à voir ni avec un quelconque défaut d’observance, ni avec une forme de déni, ni avec un refus de me soigner. Cet arrêt a été longuement discuté avec un soignant compétent.
Je sors du bureau avec ce que je demande, que la transition vers mon traitement habituel s’accélère. Mais je suis secouée du match de catch qui vient de se jouer. Je suis choquée qu’encore une fois, qu’on ait extrapolé, et, surtout, préjugé de ma mauvaise foi. Je suis écœurée.
Jouons nous vraiment dans la même équipe ?
Il y a quinze jours, au service d’accueil et d’orientation, puis dans la première unité du CHU où je suis accueillie pour quelques jours, j’ai expliqué point par point l’essai de réduire le traitement, le long sevrage, les longs échanges avec Dr D. Il n’y a eu aucun quiproquo. Où sont donc passées ces informations ?
Je sors du passage suivant à la pharmacie enragée. La molécule maudite est encore présente sur l’ordonnance, et celle que je souhaite réintroduire n’augmente pas de manière significative. Je rue dans les brancards et obtiens que le processus s’accélère.
Quelques jours plus tard, la transition vers le traitement qui me convient est établie et ma sortie est programmée. Dans l’intervalle, les nombreuses discussions avec l’infirmière Elizabeth m’ont un peu apaisé et permis de passer de la colère à l’exaspération. C’est elle, pas moi, qui a mis sur le tapis le manque d’expérience du jeune interne.
Chers lecteurs, chères curieuses, notez que face à cette situation explosive et bien que je l’ai demandé, le psychiatre référent du service n’a jamais daigné me rencontrer ni participer à la résolution du conflit.
C’est Dr Né de la Dernière Pluie qui est venu lui-même me proposer de prendre un temps long avant la fin de mon hospitalisation pour démêler ce nœud qui s’était créé. Pour ce dernier entretien, les conditions nécessaires à l’échange sont réunies. Il m’explique sa démarche, et les décisions qu’il a prise au fil de mon hospitalisation.
Nous revenons sur l’arrêt du traitement effectué au printemps. Si Dr Né de la Dernière Pluie a raison sur ce point, il est possible que je n’ai pas été en mesure de lui expliquer ma démarche dans le détail. Il est par contre certain que je n’ai jamais dit « Je m’en tape, je l’aime pas ce médoc, je l’ai arrêté sur un coup de tête ». Il a donc extrapolé, selon des préjugés qui sont révélateurs d’une hiérarchie des pouvoirs qui opère au détriment des patients. Et c’est là que cette sombre histoire commence à prendre un tournant fantastique : Dr Né de la Dernière Pluie reconnaît avoir extrapolé. À partir de là, je peux de mon côté le considérer comme un jeune praticien plein de bonne volonté, puisqu’il admet en face de moi ses torts dans notre incapacité à communiquer.
En ce qui concerne la transition de la molécule maudite vers celle qui me convient, je me targue de lui avoir appris une leçon. Quand je lui demande pourquoi cette transition a été aussi lente, il tourne vers moi l’écran de son ordinateur en montrant deux jolies courbes qui s’étalent sur trois semaines. Ce sont les courbes spécifiques au passage de la première molécule à la seconde. Elles sont tirées du DSM ou de tout autre manuel diagnostique. J’éclate de rire :
« Je ne suis pas une statistique ! ».
J’essaye de la manière la plus didactique possible de lui expliquer que vouloir effectuer en trois semaines le sevrage d’une molécule qui a été installée il y a quatre jours est ridicule, puisqu’elle n’a même pas eu le temps de faire réellement effet ! De la même manière, vouloir introduire une molécule qui me convient et dont nous connaissons la posologie effective en trois semaines est tout aussi ridicule ! Dr Né de la Dernière Pluie reste pantois, pendant qu’Elizabeth m’offre un sourire de connivence.
Je sors l’après midi même. Le combat aurait pu être évité, mais j’ai le sentiment d’en sortir victorieuse. Je quitte une nouvelle hospitalisation traumatisante, mais elle n’a pas la même teinte que les précédentes.
J’aurai pu intégrer cet article à la série ATTENTION : PSYCHIATRE MÉCHANT que j’ai inauguré récemment, mais Dr Né de la Dernière Pluie m’a offert un dénouement dans le respect et l’écoute. Lors de cette dernière discussion, lui, Elizabeth et moi, nous avons échangé sur un pied d’égalité, tout du moins nous avons aménagé au maximum la séparation des savoirs et des pouvoirs que l’institution protège avec zèle.
À la folie !
Sarah
- https://icarus.poivron.org/guide-pour-decrocher-des-medicaments-psychotropes/
- Vous retrouverez Elizabeth dans l’article HP PHOTO, « Partout, la vie passe ».
Vous avez très bien fait de garder votre calme et votre pertinence ainsi que vos connaissances expérientiel dans la posologie de votre traitement. Heureusement que vous avez eu la bienveillance une infirmière qui vous a aidé dans votre parcours thérapeutique et vous a soutenu auprès d’un psychiatre qui vraisemblablement n’est pas à l’écoute du patient est dans la toute-puissance bravo vous avez été courageuse un pair aidant vous aurez sans doute économiser ce genre d’aventure difficile ! Bonne chance à vous et bonne route
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